Interview partenaires : Les Risques en Nouvelle-Aquitaine, on en parle ?

Animation, Partenaires, Risques

04/02/2020

retrait gonflement des argiles

Virginie Audigé du service Risques Naturels et Hydrauliques à la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, DREAL, Nouvelle-Aquitaine, et Christophe Garnier à la Direction Régionale Nouvelle-Aquitaine du Bureau de Recherches Géologiques et Minières, BRGM, partenaires au sein de l’Observatoire Régional des Risques Nouvelle-Aquitaine, ORRNA, témoignent des enjeux de la thématique Risques sur le territoire, thématique bien souvent méconnue du citoyen. C’est pourquoi l’ORRNA diffuse désormais sur son site des informations et des outils à destination du grand public. Explications.

PIGMA : Les Risques en Nouvelle-Aquitaine, est-ce un sujet ? Comment mieux partager l’information, la connaissance  ?

Virginie Audigé : La région Nouvelle-Aquitaine est la plus vaste région de France (20 % de l’espace national). Elle compte 5,8 millions d’habitants (4° région française).

L’exposition aux risques naturels est très conséquente, puisqu’on évalue la population exposée aux inondations à près de 1, 5 millions d’habitants (soit près de 20 % de la population totale). Elle pourrait s’accentuer, en raison du réchauffement climatique (inondations, retrait/gonflement des argiles, feux de forêt notamment – incendie de St Jean d’Illac en juillet 2015) mais aussi en raison du développement démographique que la région pourrait connaître, en particulier sur le littoral de 900km (730 km de côtes, 80 km bassin, 150 km estuaire), zone particulièrement exposée au risque majeur de submersion (évènement Xynthia de 2010).

Ce territoire est particulièrement marqué par les inondations par débordement de cours d’eau (Charente et Clain en 1982, crue du Gave de Pau en juin 2013 et 2018, crue de l’Adour de janvier 2014 et les crues de janvier 2018, de décembre 2019…). Le littoral soumis à une double problématique submersion et érosion, est particulièrement exposé (tempêtes Martin en 1999, Klaus en 2009 et Xynthia en 2010).

Le ministre de la transition écologique et solidaire a signé le 6 février 2019 une instruction du gouvernement relative aux thèmes prioritaires d’actions en matière de prévention des risques naturels et hydrauliques pour 2019 à 2021. Un des six thèmes prioritaires est l’information sur les risques naturels.

L’ORRNA (L’Observatoire Régional des Risques Nouvelle-Aquitaine) s’intègre dans la mise en oeuvre opérationnelle au niveau régional de cette priorité nationale.

Pour cela l‘ORRNA propose par exemple :

  • un recensement et un suivi régulier des principaux événements risques naturels (inondations, glissements de terrain, feux de forêt, séismes, …) qui ont lieu sur la région,
  • des outils permettant d’appréhender facilement les risques auxquels chacun est soumis, la réglementation qui s’applique et des moyens d’agir.

L’ORRNA est aujourd’hui porté par l’Etat, avec des représentants de multiples services. Mais sa gouvernance intègre d’ores et déjà des collectivités, ce qui permet de prendre en compte au mieux les attentes de chacun.

C’est pour cette raison que L’ORRNA s’appuie sur la plateforme PIGMA, portée par le GIP ATGeRi, où la logistique et l’organisation partenariale est déjà existante. Cela permet de bénéficier d’une partie très riche de datas multi-partenariales et d’outils déjà consolidés.

En terme de contributeurs à l’enrichissement de l’ORRNA, des conventionnements ont été mis en place avec, par exemple, le CEREMA et le BRGM. Cela permet de créer encore davantage de données expertisées propres au territoire de Nouvelle-Aquitaine.

PIGMA : Pouvez-vous nous donner des exemples d’outils au service du citoyen mis à disposition dans l’ORRNA ?

Christophe Garnier : Plusieurs outils à travers l’ORRNA permettent d’informer, de sensibiliser.

Il y a en premier lieu le visualiseur cartographique qui recense les événements passés connus, ainsi que les événements récents, et en fait une brève description avec si possible des éléments photographiques. Ce visualiseur permet à tous d’identifier les événements historiques survenus autour de sa maison, dans son environnement quotidien, et ainsi d’avoir une idée des risques auxquels il pourrait être exposé.

Des articles sont par ailleurs produits régulièrement en lien avec les différentes thématiques abordées par l’ORRNA. Il peut s’agir d’actualités, à la suite d’un mouvement de terrain par exemple.

Récemment un article a été mis en ligne suite à un glissement de terrain ayant affecté les berges de Garonne, dans le Lot et Garonne. Ce type d’article contribue à prendre conscience de la sensibilité de notre territoire à certains types de phénomène. Il s’agit également d’articles qu’on peut qualifier « de fond », afin de présenter un type d’événement, les processus en jeu et les conséquences possibles, identifier les zones géographiques touchées par le passé ou susceptibles de l’être. Un article de ce type a été posté récemment sur les submersions marines, c’est un phénomène qui affecte régulièrement notre région dont la façade littorale est vaste.

Les nouvelles études sur la sensibilité du territoire, les évolutions réglementaires, les colloques ou autres événements scientifiques font également l’objet d’articles ou de mentions sur le site.

Le BRGM, qui est un établissement public porté sur les géosciences, intervient en tant que contributeur technique pour l’ORRNA. Ses contributions portent sur plusieurs thèmes et notamment sur les mouvements de terrain.

Parmi ceux-ci il y a un phénomène qui est très présent en Nouvelle-Aquitaine et dont le public parle assez peu, même si les conséquences (pas en termes de sécurité) sur le bâti et en termes financiers sont importantes (à titre collectif, 2nd poste d’indemnisation derrière les inondations au titre de la loi sur les catastrophes naturelles, et à titre individuel, le coût moyen – avec de fortes disparités- d’indemnisation d’un sinistre est de 15 000 €).

Il s’agit du phénomène de retrait/gonflement des argiles. En deux mots, lorsqu’il pleut les sols argileux gonflent, ils se rétractent en cas de sécheresse : les conséquences de ces alternances de retraits/gonflements sont particulièrement importantes pour le bâti en particulier le bâti individuel (de la fissure à la stabilité générale du bâtiment remise en cause). Et c’est un phénomène dont les conséquences ont vocation à s’amplifier à l’avenir. Pour fixer les idées, on considère que les 2/3 environ de la surface du département de la Gironde sont plus ou moins exposés au phénomène.

Sur l’ORRNA, les visiteurs ont accès à des éléments présentant le phénomène et ses conséquences possibles, les principales mesures pour s’en prémunir. Il a également la possibilité d’accéder aux documents cartographiques permettant d’identifier la sensibilité de son environnement direct et notamment de son terrain.

Les chutes de blocs et les glissements de terrain, ainsi que les problématiques d’effondrement de terrain, qu’elles soient liées à des cavités naturelles ou à des cavités creusées par l’Homme, sont également des thèmes abordés par le BRGM dans l’ORRNA. Et chaque année plusieurs dizaines d’événements (en fonction des conditions météo notamment) se produisent sur le territoire néo-aquitain.

Concernant les anciennes carrières, on pense tout de suite au secteur de l’Entre-Deux-Mers en Gironde, mais il existe de nombreuses carrières en Charentes, en Dordogne, dans la Vienne, etc. Pour les chutes de blocs, des territoires comme la Dordogne, les Pyrénées-Atlantiques sont concernés, mais pas uniquement : chaque année des instabilités sont recensées en Gironde par exemple. Même constat pour les glissements de terrain, on n’a pas forcément cette image en tête mais même les Landes (partie sud) sont touchées.

Pour l’ensemble de ces phénomènes de mouvements de terrain, le BRGM capitalise de l’information à travers ses missions d’expertise et d’appuis aux politiques publiques, information qui est portée à la connaissance du plus grand nombre à travers l’ORRNA !

Crédit photo BRGM : Conséquences retrait/gonflement des argiles