Données, IA et territoires : vers un virage confirmé de l'IA ?

Données, Toutes

31/10/2025

OBSERVATOIRE DATA PUBLIC

L’Observatoire Data Publica a conduit la quatrième édition de son baromètre sur la data et l’IA dans les collectivités locales. Le recueil des réponses est clos depuis le 31 juillet 2025 ; l’analyse est en cours et viendra nourrir les échanges au sein des réseaux territoriaux, dont PIGMA en Nouvelle-Aquitaine. Après un engouement marqué en 2024, cette nouvelle enquête confirmera-t-elle la montée en puissance de l’IA dans les territoires ou marquera-t-elle un palier dans son appropriation ? Aperçu.

Depuis 2020, l’Observatoire Data Publica observe l’évolution des pratiques et des stratégies locales en matière de données publiques. Chaque édition de son baromètre constitue une photographie unique du degré d’appropriation de la donnée par les collectivités, mais aussi de leur passage progressif à l’usage de l’intelligence artificielle.

Une démarche pour mieux comprendre les usages territoriaux de la data et de l’IA

La quatrième enquête, close au 31 juillet 2025 et relayée par PIGMA, permettra d’actualiser ces tendances et de mesurer les effets du tournant IA pris par de nombreuses collectivités depuis deux ans. Les résultats seront restitués au premier semestre 2026 et viendront alimenter les travaux des acteurs territoriaux, des institutions et des réseaux régionaux comme PIGMA, en appui à la diffusion d’une culture partagée de la donnée et de l’innovation publique.

Les enseignements du précédent baromètre : un virage confirmé vers l’IA

L’Observatoire recense plus de 250 projets d’IA territoriale menés entre 2023 et 2025. Fin 2024, 75 % des régions, 62 % des métropoles et 14 % des communes de moins de 10 000 habitants avaient initié des projets impliquant des systèmes d’intelligence artificielle (SIA). Au total, une collectivité sur deux de plus de 3 500 habitants a déjà expérimenté un usage de l’IA, marquant une accélération spectaculaire par rapport aux années précédentes.

Les usages identifiés se concentrent sur :

  • la gestion administrative et interne (29 %) ;
  • la relation aux usagers (11 %) ;
  • les domaines de la ville intelligente (45 %) : énergie, eau, déchets, mobilité, éclairage, environnement.

Si de nombreux projets sont encore en phase de test, ils traduisent un mouvement d’expérimentation généralisé dans l’ensemble du service public local.

Baromètre Data Publica usages de l'IA en Collectivités 2024
Répartition des usages de l’IA dans les collectivités locales (Baromètre 2024) Source : Observatoire Data Publica, 3ᵉ Baromètre 2024, CIVITEO / Banque des Territoires

Les conditions d’une IA utile, performante et acceptable

L’étude propose un cadre d’analyse — un “radar de décision” — pour aider les collectivités à évaluer la pertinence d’un projet d’IA selon quatre axes :

  • Utilité : amélioration du service public, fiabilité, personnalisation, performance.
  • Confiance : transparence, conformité RGPD, contrôle des biais, supervision humaine.
  • Frugalité : sobriété énergétique et limitation de l’impact environnemental (en lien avec le référentiel AFNOR “IA frugale”).
  • Capacité : appropriation, formation et montée en compétences des agents.

Ce cadre aide les décideurs à éviter le “faire de l’IA pour faire de l’IA” et à ancrer les projets dans les besoins réels du territoire.

Un enjeu de gouvernance et de souveraineté numérique

L’étude souligne que la souveraineté numérique locale repose d’abord sur la maîtrise des données et des systèmes :

  • hébergement souverain,
  • auditabilité des algorithmes,
  • compréhension du fonctionnement des IA utilisées,
  • transparence vis-à-vis des usagers.

Cette maîtrise est aussi une condition de légalité : les IA ne peuvent pas être utilisées comme fondement exclusif d’une décision administrative. L’humain doit rester responsable et en capacité d’expliquer la décision.

Une IA “frugale” et responsable

L’analyse met en lumière la tension entre innovation technologique et impact environnemental. Les collectivités doivent désormais se doter d’une stratégie numérique responsable, et les projets d’IA sont évalués selon leur empreinte écologique. Le principe directeur : “l’IA la plus frugale est celle que l’on n’utilise pas” si elle ne crée pas de bénéfice net pour la collectivité.

Impacts sur les métiers et nouvelles pratiques

L’étude explore l’impact de l’IA sur le travail dans les administrations :

  • transformations organisationnelles,
  • évolution des rôles managériaux (supervision, explicabilité),
  • nouvelles compétences à acquérir.

Des grilles d’analyse sont proposées pour mesurer les effets sur la qualité de vie au travail, la motivation et la performance. Les démarches de formation et d’expérimentation encadrée sont jugées essentielles pour garantir une appropriation progressive et réduire les craintes des agents.

Vers une méthodologie de l’expérimentation

Les territoires pionniers (Montreuil, Lyon, Bordeaux, Nantes, Paris-Saclay, Occitanie, Corse, etc.) ont contribué à la création d’outils libres de droits :

  • le Radar de décision (pour évaluer les projets d’IA),
  • le Girouet (outil d’analyse des impacts métiers),
  • des grilles de suivi disponibles sous licence CC-BY-NC 4.0.

Ces outils visent à rendre actionnables les principes éthiques et juridiques et à soutenir la diffusion d’une IA publique utile, performante et acceptable.

En conclusion, l’étude dresse le constat d’une appropriation rapide, mais encore fragile de l’IA par les collectivités. Si les expérimentations se multiplient, leur pérennisation dépendra de la maîtrise de trois conditions clés :

  • un cadre de confiance juridique et éthique,
  • des systèmes frugaux et transparents,
  • une acculturation généralisée des agents publics.

En somme, après la phase de découverte, vient le temps des premiers choix stratégiques : faire de l’IA un véritable levier d’intérêt général — au service des territoires, et non l’inverse.

Pour suivre la publication des résultats : consultez régulièrement le portail de l’Observatoire Data Publica et les actualités PIGMA, et abonnez-vous à la newsletter PIGMA pour être averti de la parution de la synthèse.

Source : Observatoire Data Publica