Eric Thalgott, grand témoin : les données, carburants de l’innovation

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23/06/2025

RENCONTRES REGIONALES PIGMA 2025 ERIC THALGOTT

Le Grand Témoin des Rencontres régionales PIGMA 2025, Éric Thalgott, vice-président de l’Afigéo, a livré une intervention stratégique et engagée sur le rôle structurant de la donnée dans la transformation des territoires. Entre avancées technologiques, limites économiques et nécessité d’un nouveau pacte public/privé, il a appelé à une mobilisation collective autour d’une filière géonumérique souveraine, pérenne et interopérable.

Eric Thalgott a commencé par rappeler que la donnée, en particulier la donnée spatiale et géographique, est devenue un levier essentiel de transformation et d’innovation. S’appuyant sur son parcours chez Geofit, il a souligné que cette dimension était déjà considérée comme stratégique au début des années 2000, tant pour concevoir des infrastructures fiables que pour transmettre des informations pertinentes aux bureaux d’étude et aux décideurs publics.

Il s’est appuyé également sur les travaux de l’Afigéo, qui fédère l’ensemble des acteurs de l’information géographique (publics, privés, académiques et associatifs) et a mené une étude économique visant à mieux cerner le poids, les dynamiques et les perspectives de la filière.

Les données aident à prendre des décisions éclairées pour répondre aux défis actuels et futurs dans tous les domaines. La donnée spatiale et géographique devient très précise et s’acquiert à des couts financiers plus accessibles.

La donnée géographique, levier stratégique de transformation

Il a évoqué plusieurs avancées technologiques majeures, comme le PCRS (orthophotographies à 5 cm), le LIDAR aérien, ou encore le jumeau numérique de la France, fruit d’un partenariat entre l’IGN, le CEREMA, l’INRIA et des entreprises privées. Ces outils permettent aujourd’hui de modéliser le territoire en 3D avec une très haute précision.

Eric Thalgott a souligné aussi le rôle croissant de l’intelligence artificielle, qu’elle soit générative ou prédictive, dans l’analyse des données spatiales, l’anticipation des risques et la production d’indicateurs pertinents. Couplée aux objets connectés, elle permet des remontées d’information en temps réel, utiles à l’action publique et à la gestion de crise.

Modèle économique : le talon d’Achille du secteur

Cette dynamique, bien qu’enthousiasmante, reste complexe. L’open data a profondément modifié les pratiques, devenant une ressource librement accessible. Toutefois, en l’absence de modèle économique durable, la mise à jour et la qualité des données restent incertaines et vulnérables. De même, malgré les investissements, l’intelligence artificielle a du mal à trouver des applications concrètes, ce qui interroge sur sa réelle viabilité dans la durée.

Dans ce contexte, les start-up innovent, mais peinent à consolider leur modèle économique, tandis que PME et ETI, souvent moins soutenues, investissent sur fonds propres avec une meilleure lecture des besoins. Le rapprochement entre ces acteurs pourrait favoriser des dynamiques complémentaires et durables.

Aussi, face aux défis budgétaires et technologiques, les initiatives collectives sont à privilégier. Des plateformes comme PIGMA ont démontré la pertinence d’un fonctionnement équilibré en mutualisant et fédérant l’écosystème local. Le besoin de souveraineté en matière de données, en particulier géographiques, apparaît de plus en plus urgent, notamment face à la domination des GAFA, qui imposent leurs standards et captent la valeur.

Malgré des cycles décisionnels généralement plus longs, les structures publiques, telles que l’IGN, le CEREMA ou l’INRIA disposent de compétences clés en R&D. Leur collaboration avec le secteur privé, surtout les start-up et PME, représente un levier stratégique, comme en témoignent les programmes Datalliance (IGN) ou Connect by CNES, qui valorisent les synergies entre expertise publique et innovation entrepreneuriale.

Le collectif CICCLO, porté par l’Afigéo, travaille à l’interopérabilité des plateformes et à la mutualisation des outils, avec pour objectif de renforcer la coordination entre territoires et de contribuer aux stratégies nationales. Structurer un écosystème cohérent, efficace et résilient passe ainsi par une collaboration étroite entre plateformes, entreprises et institutions.

L’enjeu de la collaboration public–privé

Enfin, Eric THALGOTT a mis en évidence une évolution majeure : la donnée seule ne suffit plus. Sa valeur dépend désormais de sa mise en usage et de son ancrage métier. Les géoplateformes et les entreprises du secteur de l’information spatiale l’ont compris, en s’ouvrant à des cas d’usage concrets et en nouant des partenariats intersectoriels.

Dans un contexte de raréfaction durable des financements publics et de progrès technologiques rapides, la nécessité de repenser les relations entre secteur public et entreprises privées devient urgente. Malgré des intentions louables et une volonté d’agir pour l’intérêt général, la contrainte économique reste centrale. La pérennité de l’écosystème dépend en partie de la capacité à préserver les compétences du secteur privé, tout en renforçant les outils publics pour l’aide à la décision et l’aménagement du territoire.

Une collaboration gagnant-gagnant entre acteurs publics et privés semble donc indispensable. Cela suppose toutefois de surmonter les contraintes réglementaires (code de la commande publique, règles de concurrence) et d’engager une évolution des postures. La rapidité des transformations impose d’agir sans délai.

Des groupes de travail seront prochainement lancés par l’Afigéo et ses partenaires pour explorer ces pistes de coopération. L’appel est lancé à tous les acteurs concernés pour y contribuer activement. Enfin, les GeoDatadays, organisés à Marseille les 10 et 11 septembre, permettront de poursuivre ces réflexions collectives.